Cher Thomas,
Cela me fait bizarre de t’écrire cette lettre, mais après de longues années de tergiversations, j’ai décidé de prendre formellement et solennellement ton parti ici et maintenant.
Cher Thomas,
Cela me fait bizarre de t’écrire cette lettre, mais après de longues années de tergiversations, j’ai décidé de prendre formellement et solennellement ton parti ici et maintenant.
Chers frères et sœurs de la communauté paroissiale Saint Leu Saint Gilles
Chers frères et sœurs de la communauté paroissiale Saint Leu Saint Gilles,
La peur, l’inquiétude et l’incertitude règnent depuis plus d’un mois sur nos têtes, dans nos cœurs et nous empêchent de vivre normalement et de nous rencontrer en chair et en os. La litanie quotidienne des hospitalisations, des personnes en réanimation, des décès nous frappe de plein fouet. Il semble que nous sommes entrés dans un cercle vicieux qui ne finira jamais. Les dernières estimations nous disent qu’il faudra sans doute au moins encore un mois avant de commencer à retrouver une vie normale. Notre société, si habituée depuis des décennies a bien caché la mort, ne sait plus comment gérer ce flux d’information mortifère. Des gens de la rue que je rencontre chaque mardi matin lors de la permanence courrier de l’association Aux Captifs la libération, me parlent de la fin du monde ou du moins d’un monde. C’est vrai et face à ces événements, notre foi peut se poser des questions tout particulièrement en ce temps où nous célébrons la passion, la mort et la résurrection de notre Seigneur.
Si nous relisons les textes proposés par la liturgie, nous y retrouverons des sentiments des premiers disciples de Jésus que nous comprenons et partageons, aujourd’hui plus que d’habitude. Le voyant mort sur la croix, bien mort et mis au tombeau, ils se disent qu’ils se sont trompés sur son compte et que Jésus avait lamentablement échoué dans sa mission. Ce sentiment est aussi partagé, plus douloureusement encore, par ces femmes qui se rendent au tombeau de bon matin. Trouvant la sépulcre ouvert, elles paniquent et font appel à Pierre et à l’autre disciple qui accourent. Et ils virent le linceul à terre. Le corps de Jésus n’y était plus. Il a sûrement été emporté, volé. Ils n’arrivent pas à percevoir qu’il ne s’agissait que de la réalisation des promesses annoncées par Jésus. Ils regardent le sépulcre vide avec les yeux de la mort et non avec les yeux de la vie. Une personne triste, affligée ou même en colère, ne voit que le négatif, le manque, l’absence.
La résurrection n’est certes pas la joyeuse fin d’une histoire tragique, mais le début d’une nouvelle vie, la transformation de la vie précédente. Jésus désire que nous ressuscitions aujourd’hui avec Lui, c’est à dire que nous transformions notre pensée, notre regard… notre vie ! Il veut nous partager aujourd’hui, non pas demain, ou dans un paradis futur, mais aujourd’hui, la joie et l’espérance qui ne génèrent pas la mort mais qui transforment la vie.
Acceptons ce message de la Bonne Nouvelle de la Résurrection. Préférons-nous pleurer sur nous-mêmes et sur nos morts ou transformer notre vie avec Jésus ?
Seigneur Jésus, ressuscite dans l’aujourd’hui de notre humanité si affligée par ce terrible virus mortel, qui limite notre vie, mais qui ne conditionne pas notre foi et notre espérance en toi.
Redonnes-nous la joie de célébrer Pâque, de la même manière que tu l’as célébré avec tes disciples à la dernière cène, autour de la table du pain et du vin de l’amour qui se fait service, avec le don total de la vie.
En ces jours terribles que nous vivons, sans eucharistie, sans la pénitence et la proximité physique des frères de la communauté, nous avons mieux compris l’importance d’être toujours avec Toi, à travers les signes sacramentels que tu as institué au cours de la dernière cène pour nous faire comprendre qu’a chaque instant de notre vie tu es proche de nous.
Jésus, ressuscité des morts, ouvre les petits sépulcres que nous portons dans nos cœurs, où demeurent la mort, la tristesse et l’absence.
Elimine de nos vies tout ce qui nous enferme dans une vision de l’existence purement terrestre.
Nous savons que nous ne serions pas des cœurs et des âmes de ressuscités si nous ne faisions pas un trésor de cette grande leçon de l’histoire que nous vivons aujourd’hui, leçons de limite de nos connaissances techniques et scientifiques et que nous aurons à porter et cela bien au-delà de la crise sanitaire mais aussi de la solidarité qui s’est vécu.
Chers frères et sœurs, le premier dimanche où nous pourrons tous nous revoir après le confinement, nous célébrerons un dimanche communautaire pour nous retrouver et glorifier ensemble le Seigneur qui est le Vivant pour les siècles des siècles.
Le Christ est ressuscité Alléluia
Oui, Il est vraiment Ressuscité Alléluia
Bonne fête de Pâques
Fr. Thierry Knecht, O.SS.T.
par le frère Thierry Knecht
par le frère Thierry Knecht
par le frère Thierry Knecht
Nous voici arrivés au dernier acte de notre mini cheminement de conversion : après nous être posé la question si Dieu était déjà né dans nos cœurs, après avoir cherché à nous situer et à comprendre la direction que prenait notre vie et éventuellement la corriger, nous avons rencontré cette grande figure de Jean qui malgré la faillite apparente du Messie – était invité à ouvrir les yeux et à observer les signes du salut semés dans nos vies par Jésus.
Voilà qu’aujourd’hui, à quelques heures de la grande nuit, la Parole nous présente un second personnage, extraordinaire lui aussi, et qui vit l’attente : Joseph de Nazareth. Pauvre Joseph, il lui arrive des belles et des pas mûres dans la vie ! D’abord, Dieu lui ravie sa promise, puis il fatigue – lui le charpentier habitué aux planches et aux clous – à comprendre cet enfant aussi extraordinairement ordinaire et cette épouse très aimée toute enveloppée du mystère. Enfin, nous les chrétiens qui avons cherché à combler les trous béants de sa biographie, comme si ce que nous disait les évangiles sur Joseph ne suffisait pas. Et nous en avons rajouté une couche en inventant une figure improbable de charpentier silencieux de Nazareth tous simplement pour satisfaire notre imagination et curiosité. De lui, l’évangile nous livre essentiellement trois données largement suffisantes pour notre cheminement de chrétien.
Avant tout, Matthieu commence son évangile avec une fastidieuse liste généalogique allant d’Abraham jusqu’à Joseph en passant par David. On y trouve des noms de saints et de pécheurs, de grands personnages et d’illustres inconnus, comme pour nous dire que Joseph est un élément de la promesse, de cette volonté obstinée de Dieu de sauver le monde à travers l’expérience pauvre et dramatique du petit peuple Israël. Joseph est bien l’un des nôtres, certes d’extraction noble, il compte parmi ses ancêtres le roi David, mais c’est un homme simple et pauvre. Dans la logique de Dieu, les masters et les prix nobels ne sont guère nécessaires pour être des collaborateurs du salut. Dieu vient dans le monde, donc, las d’être incompris, convaincu de pouvoir se dire, se raconter, se présenter plus clairement à ces hommes obtus qui embrassent continuellement les idoles de leur émotivité typiquement adolescente. Et il a besoin d’aide : Marie, Joseph, des personnes simples, vraies et disponibles.
Entre Marie et Joseph il y a de l’amour, Matthieu comme Luc parle pudiquement de ce lien étroit entre eux. Ils sont des « époux promis », qui dans la culture d’Israël signifie beaucoup plus que simples fiancés. Pour un an, ils pouvaient vivre ensemble de manière conjugale sans pour autant cohabiter. Donc le seul à savoir que cet enfant n’était pas le sien était justement Joseph. Osons, comme nous y invite saint Ignace de Loyola, imaginer la scène, cette nuit d’insomnie de Joseph venant d’apprendre que sa promise était enceinte ? Quelles pensées le traversent ? Quelle souffrance et douleur dans son cœur trahi… Se serait-il donc trompé à aimer tout particulièrement cette fille de Nazareth ? La loi exigerait qu’il la dénonce et qu’elle soit condamnée à la lapidation. Mais Joseph l’aime, il veut la sauver, il trouve un subterfuge : il dira qu’il s’en est lassé, il la répudiera en déclarant qu’il ne veut plus comme épouse, la sauvant ainsi de la mort et du déshonneur. Matthieu, comme bon israélite, décrit cette attitude comme juste. Joseph est juste, c’est-à-dire irrépréhensible, authentique, honnête ; il ne juge pas selon les apparences, mais même blessé à mort, il sait faire taire son orgueil offensé et use de miséricorde envers la femme qu’il aime. Et durant la nuit, un songe l’invite à se fier et lui donne une clé de lecture improbable à ces événements, l’invitant ainsi à embrasser l’inédit de Dieu. Et relisez, je vous prie ! – Joseph se lève et donne raison à l’ange et prend chez lui la folie de Dieu.
Grand et illustre Joseph. Tu es un géant. Tu nous donnes aujourd’hui du grain à moudre, toi le silencieux, toi qui a été choisi comme tuteur et gardien de Dieu.
Oui, Joseph nous dit avant toute chose que Dieu, lui, est fidèle à ses promesses de salut. Il nous enseigne à être des hommes justes, droits, à ne pas juger selon les apparences, à perdre cette manie d’apparaître et de surprendre à tout prix, à avoir plus de tendresse que de justice, à entrevoir le mystère derrière des réalités apparemment évidentes. Joseph nous enseigne à avoir le courage du rêve, dans un monde désenchanté et cynique ; lui, grand rêveur, construira sa vie sur un songe, il plie sa volonté et son destin à celle de Dieu qui lui demande de mettre entre parenthèse sa vie pour laisser de l’espace à la réalisation de son projet inédit d’incarnation.
par le père Thierry Knecht
par le père Thierry Knecht
par le père Thierry Knecht