Feuille de quinzaine n°494

Du dimanche 11 juin au dimanche 25 juin 2023

« Mais où est passé Jésus ? »

A cette candide question d’un petit enfant, qu’auriez vous répondu ?

Comme je lui expliquais, aussi patiemment que je pouvais, que Jésus était présent dans le tabernacle, l’enfant me dit, avec déception : « mais elle est toute petite la maison de Jésus ! ». Visiblement, il lui fallait un immense palais, à la mesure d’un Dieu aussi grand.

« Il dort là Jésus » ? Puis, cette affirmation : « on me dit toujours de ne pas faire de bruit dans l’église, comme quand mon papy fait la sieste. ». « Et mon autre papy, il dort pour toujours, parce qu’il était très fatigué ». Devant mon affirmation que Dieu ne dormait pas, cette remarque : « Si Jésus ne dort pas dans le tabernacle, c’est qu’il n’est pas fatigué ! ». 

Les remarques enfantines font sourire, mais ne cachent-elles pas souvent une part de désarmante vérité ?

Si le Seigneur veille dans le tabernacle, il n’est pas fatigué : ni de nos rebuffades, ni de nos absences, ni de nos prières rabâchées ou de nos demandes inconsidérées : il guette le cœur qui s’ouvre à lui (Ps 51,19), l’obole de la veuve (Mc 12,43), la prière du publicain (Luc 18,9).

Cette cascade de solennités liturgiques depuis plusieurs semaines nous ont portés vers de hauts sommets. Pâques, puis l’Ascension, Pentecôte et Trinité, avec maintenant cette solennité de la Fête-Dieu.

Le Credo place sur nos lèvres chaque dimanche que « le Christ est assis à la droite de Dieu le Père tout puissant ». D’où cette légitime envie de le voir siéger sur un trône somptueux. Et, pour une imagination  enfantine, la satisfaction de se représenter un Dieu partant comme sur une fusée pour traverser des immensités, puis siégeant sur tout l’univers, le plus majestueusement possible.

Mais le docte et brillant dominicain St Thomas d’Aquin nous a déjà mis sur la bonne voie, dans sa somme théologique : « si le trône de notre Dieu est dans le ciel, c’est pour contenir le ciel ».

Comme nous sommes faits à l’image de Dieu, nous pouvons approcher de cette mystérieuse réalité dans notre propre prière. Il nous arrive certainement de dire que « nous prions pour toute une famille, une communauté, ou même un pays ». Comment imaginer tant de personnes, chacune avec sa propre vie, dans ces dizaines d’années de bonheur et de tristesse, trouvant une place durable et adaptée dans ces quelques mots balbutiés, dans ces quelques minutes accordées à Dieu ?

C’est pourtant bien ce que fête l’Eglise aujourd’hui : ce miracle permanent de la présence de Dieu au tabernacle, et donné pour le monde entier, offert à chaque eucharistie, aimant aussi partir à la rencontre des cœurs ouverts. Comme celui de ce paysan madré qui expliquait simplement  au curé d’Ars ce qu’il faisait dans l’église, devant le corps du Christ dans l’ostensoir : «  je l’avise, et il m’avise ».

A.B.+