Deux passages d’Évangile nous racontent, chacun à sa manière, que Marie a conçu son enfant sans avoir eu de relation sexuelle avec Joseph (Mt 10, 18-25 ; Lc 1, 26-38). Ces récits ont aussitôt suscité des moqueries chez les païens, les juifs et chez certains chrétiens eux-mêmes. « Ce sont les récits mythologiques de nos ancêtres, disaient-ils, qui s’imaginaient que des vierges pouvaient donner naissance à des dieux ! »
L’Église a immédiatement réagi en présentant cette conception virginale du Christ comme une donnée essentielle de l’Évangile. Cette vérité devint rapidement une affirmation dogmatique proclamée dès le Symbole des Apôtres : « Il a été conçu du Saint-Esprit, Il est né de la Vierge Marie. »
Ce mystère s’éclaire à la lumière du mystère encore plus grand de l’Incarnation. Tous, autant que nous sommes, nous existons parce que, un jour, nos parents se sont tendrement aimés. Or, les chrétiens ont l’audace d’affirmer qu’un enfant a totalement échappé à cette loi fondamentale de la condition humaine. En la nuit de Noël, l’Enfant Jésus se trouve dans la crèche, parce qu’Il a décidé de Lui-même de venir dans le monde. Il est le Verbe éternel de Dieu qui préexiste depuis toujours à ses parents. Par l’archange Gabriel, Il a simplement demandé à Marie si elle voulait bien L’accueillir. Cet éclairage ne supprime évidemment pas le mystère, mais il nous permet de trouver presque logique la façon dont l’Emmanuel a fait irruption parmi nous.
Autre éclairage. La ressemblance entre la façon dont le Fils de Dieu a pris une âme et un corps d’homme dans le sein de sa mère et la façon dont, la nuit de Pâques, Il est sorti de sa tombe. C’est dans un grand silence et sans effraction qu’un sein, soudainement, s’est trouvé plein, plein de vie, et qu’une tombe, tout aussi soudainement, s’est trouvée vide, vidée d’un cadavre redevenu plein de vie.
Mgr Garnier, mon évêque, écrivait un jour à ses ouailles de Cambrai : « J’aime ce Dieu qui, en deux clins d’œil majeurs, vient nous surprendre avec humour dans ce que nous croyons savoir de plus sûr : une vierge ne donne pas la vie et un mort ne sort pas de sa tombe. Et Dieu le fait sans jeter le moindre soupçon sur l’amour charnel vécu par les époux, ni prendre à la légère l’épreuve de la mort. »
Ce mystère s’éclaire à la lumière du mystère encore plus grand de l’Incarnation.
De même, on s’étonne moins du mystérieux changement qui se produit sur nos autels, lorsque le corps du Christ prend soudain toute la place d’un morceau de pain, si l’on se souvient de la façon dont Il a été formé en un instant dans le sein de sa mère. Le mystère de l’eucharistie prolonge celui de l’Incarnation. Il permet au Christ de réaliser le désir le plus profond de son cœur d’amoureux : se rendre présent au plus intime de nous-mêmes et y déverser ses trésors de tendresse.
Enfin, par la maternité virginale de Marie, Dieu nous donne une icône merveilleuse de sa propre paternité. La liturgie orientale célèbre Marie en chantant : « Tu as enfanté le Fils sans père, ce Fils que le Père ne cesse d’enfanter sans mère ! »
L’Annonciation est fêtée exceptionnellement le 4 avril, le 25 mars étant cette année le Vendredi saint.