Cette parabole a changé pour moi le visage de Dieu.
Un mystique du XXe siècle, en interprétant ce texte disait : notre cœur est une poignée de terre, semée de bonnes graines et assiégée par les mauvaises herbes ; une motte de terre où leurs racines parfois inextricables tissent le bien et le mal.
« Veux-tu que nous allions enlever les mauvaises herbes? » demandent les serviteurs au maître. La réponse est impérative : « Non, en enlevant l’ivraie , vous risquez d’arracher le blé! ». Un conflit de point de vue : celui des serviteurs voient le mal, le maître le bien. Le semeur infatigable répète : regardez le bon blé de demain, non l’ivraie. La mauvaise herbe est secondaire, elle vient plus tard.
Pense à la bonne semence. Devant Dieu, un épi de blé vaut plus que toute l’ivraie du champ, le bien est plus important que le mal, la lumière compte plus que les ténèbres.
En fait, la morale de l’Évangile n’est pas celle de la perfection, l’idéal absolu et immaculé, mais celle du chemin, de la fécondité, des grappes qui mûrissent au soleil, des épis qui se gonflent de vie.
La parabole nous invite à nous libérer des faux examens de conscience trop souvent négatifs, de dresser la longue liste habituelle des ombres et des fragilités, qui est toujours la même. Notre conscience claire, éclairée et sincère doit d’abord découvrir ce qui est vital, beau, bon, prometteur, la main vivante de Dieu qui a semé en nous : notre jardin, l’Eden nous est confié.
Choisissons la route où Dieu agit : pour vaincre la nuit, il éclaire le matin ; pour faire fleurir la steppe stérile, il jette infiniment des semences de vie ; pour faire lever la pâte lourde et immobile, il met une pincée de levure. Dieu est la source du cosmos, à nous revient de devenir l’été parfumé de la la moisson. Je ne suis pas mes défauts ou mes faiblesses, mais mes maturations. Je ne suis pas créé à l’image de l’Ennemi et de sa nuit, mais à l’image du Créateur et de son jour.
L’activité religieuse, solaire, positive, vitale que nous devrions avoir pour nous-mêmes consiste à ne pas se préoccuper d’abord de la mauvaise herbe ou des défauts, mais de vénérer toutes les forces de gentillesse, de générosité, d’accueil, de beauté et de tendresse que Dieu nous donne. Que ces dernières éclatent de toutes leurs forces, dans toute leur puissance et nous verrons l’obscurité disparaître.
Gardons et cultivons avec le plus grand soin nos talents, nos dons, les semences de vie et l’ivraie aura de moins en moins de place. Prenons soin de la bonne semence, aimons la vie, protégeons chaque pousse, soyons indulgents avec toutes les créatures. Et soyons indulgent envers nous même. Et tout notre être s’épanouira dans la lumière.
fr. Thierry