Ils ne comprennent rien, on leur impose quelque chose que, peut-être, ils n’auraient pas choisi… Et pourtant, depuis des siècles, on les baptise. Le baptême des bébés souligne le don gratuit de Dieu qui leur est fait – qui n’attend d’ailleurs ni le nombre des années, ni un certain niveau d’intelligence pour s’épanouir.
L’argument le plus avancé, pour refuser le baptême d’un bébé, est peut-être celui du choix : « Je ne baptise pas mon enfant, ainsi il pourra choisir quand il sera plus grand. »
Encore faut-il que l’enfant, devenu « grand », puisse choisir « en connaissance de cause » (peut-on vraiment choisir ce qu’on ne connaît pas ?) : qu’on lui ait parlé suffisamment de Dieu pour qu’il n’ait pas de fausses images de lui et qu’il souhaite devenir son enfant…
Cependant, cet argument n’est pas idiot. Le rite central du baptême, l’immersion dans l’eau ou l’ablution, n’est pas séparable de la profession de foi qui le précède. Or, pour être capable d’adhérer à la foi de l’Église, il faut l’avoir découverte, la connaître un minimum. Ainsi, répondant à l’ordre de Jésus d’enseigner et de baptiser (cf. Matthieu 28, 19), les Apôtres ont annoncé l’Évangile à des adultes et ont baptisé des adultes.
Avant que l’homme ne fasse le choix de Dieu, Dieu le choisit
Cependant, il ne faudrait pas croire que l’habitude de baptiser les bébés a été prise tardivement, en contradiction avec les pratiques de l’origine. Les Apôtres se souvenaient de l’affection de Jésus pour les enfants, ils l’avaient souvent vu les embrasser et les bénir : « Laissez venir à moi les petits enfants, ne les empêchez pas, car c’est à ceux qui leur ressemblent qu’appartient le Royaume de Dieu » (Matthieu 19, 14). Ainsi trouve-t-on dès le Nouveau Testament des allusions au baptême des tout-petits, quand il est dit par exemple que telle maisonnée fut baptisée : cela inclut sûrement les esclaves, les enfants et les bébés (cf. Actes des Apôtres 16, 15[1]).
Comment cela se fait-il ? « Il y a à cela une unique raison », explique le Youcat. « Avant que l’homme ne fasse le choix de Dieu, Dieu le choisit. Le baptême est par conséquent une grâce, un cadeau immérité venant de Dieu qui accueille sans condition » (n° 197). Que le candidat au baptême ait trois semaines ou 30 ans, qu’il soit atteint d’un handicap, d’une maladie psychique ou que son intelligence soit « normalement » développée, Dieu ne regarde ni le nombre de ses jours ni ses capacités intellectuelles pour se donner à lui le jour de son baptême. Tout homme a besoin d’être sauvé, même le plus petit ! Par ce sacrement, Dieu en fait son enfant adoptif et le délivre de l’influence du péché originel et de la puissance de la mort.
Personne, à moins de naître de l’eau et de l’Esprit, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu. Jean 3, 5
La grâce de Dieu n’attend pas pour s’épanouir
On peut même dire que la grâce du baptême trouve un terreau particulièrement favorable chez ces « petits », capables plus souvent que nous d’une confiance absolue envers Dieu, et dont la porte du cœur n’est pas encore fermée au don de Dieu par le péché. « Ce que tu as caché aux sages et aux savants tu l’as révélé aux tout-petits » s’exclame Jésus, dans sa prière à son Père (Matthieu 11, 25).
Qui n’a pas été « scotché » un jour par la profonde réflexion spirituelle d’un tout petit enfant ? Ou par son intense recueillement lors d’un moment de prière ? « Puisqu’on va aller dans l’éternité avec Dieu, pourquoi faut-il naître et mourir ? », demande un jour tout de go Marie-Aimée, 4 ans, à ses parents.
L’Église reconnaît que le petit enfant, même n’ayant pas atteint « l’âge de raison », peut avoir une véritable amitié avec le Seigneur (proportionnelle à son âge, bien sûr), présent en son âme depuis son baptême. Elle a déclaré vénérables (cette étape précède la béatification), bienheureux ou saints plusieurs enfants non martyrs : par exemple Antonietta Meo, décédée à 6 ans seulement, mais qui a laissé plus de 150 lettres (!) écrites à Jésus, Marie et la Trinité – lettres d’une profondeur spirituelle et d’une justesse théologique stupéfiantes ; Anne de Guigné (qui décida à 4 ans de « devenir bonne ») ; Faustino Perez-Manglano ; les petits voyants de Fatima…
Cela dit, si Dieu donne la foi – et lui seul -, il choisit d’avoir besoin des parents, des éducateurs, pour que l’enfant prenne conscience de ce don et le nomme : étant infiniment respectueux de sa liberté, il ne souhaite pas s’imposer et se donne de manière cachée. Il leur appartient de le révéler à leur enfant (voir encadré ci-dessous).
La foi n’est pas l’affaire d’un instant mais de toute une vie
C’est également par la profession de foi des parents, parrain et marraine, que l’enfant est baptisé dans la foi de l’Église.
Cependant, la profession de foi n’est pas l’affaire d’un instant, mais de toute une vie. Elle est à réaffirmer à tout âge : ainsi, chaque année, à Pâques, nous renouvelons les promesses de notre baptême, en renonçant au mal et en confessant notre foi comme lors de cette célébration (avec les trois questions-réponses : « Renoncez-vous… ? Nous renonçons. » « Croyez-vous… ? Nous croyons »).
En France, l’Église demande souvent que l’enfant ratifie vers 12-13 ans le geste que ses parents ont posé pour lui quand il était petit. Lors de la profession de foi, il revêt symboliquement le vêtement blanc de son baptême en mettant une aube et confesse publiquement et personnellement sa foi. Il reçoit à nouveau un cierge allumé, signe que le Christ est depuis sa naissance la lumière de sa vie et qu’il doit être à son tour lumière du monde.
La confirmation est également ce jour où le Saint-Esprit vient confirmer le jeune dans la foi, lui donner la force d’en vivre et d’en témoigner autour de lui.
Quand vous rentrerez chez vous aujourd’hui, allez chercher quelle est la date de votre baptême, et cela pour la fêter, pour rendre grâce au Seigneur de ce don. Le ferez-vous ? Pape François, 11 septembre 2013
Un prêtre peut-il refuser de baptiser mon enfant si je n’ai pas l’intention de lui faire suivre le catéchisme plus tard ?
Dans tous les cas, un baptême ne sera jamais refusé. Cependant, il peut être différé pour inciter les parents à réfléchir sur le sacrement du baptême… qui n’est ni une démarche administrative, ni un coup de baguette magique !
En effet, si le baptisé est bel et bien devenu chrétien – il appartient au Christ, porte d’accès à la vie éternelle -, le baptême n’est pas un événement ponctuel, mais une vie appelée à grandir et s’épanouir. Être chrétien, c’est être ami du Christ, et on ne peut l’être que si on le connaît, et si l’on apprend à l’aimer. D’où la demande faite aux parents d’éduquer chrétiennement leur enfant, de lui permettre de participer au catéchisme et de recevoir les sacrements.
Et puis, n’est-ce pas justice que d’expliquer à son enfant ce qu’il a reçu étant petit ? C’est ainsi qu’il pourra, plus tard, ratifier en toute connaissance de cause le don reçu et le faire fructifier à son tour.
Concrètement, cela veut dire quoi « éduquer chrétiennement » mon enfant ?
Dommage de s’en tenir à un « minimum vital », d’attendre le catéchisme pour que l’enfant entende parler pour la première fois de son Père du Ciel !
Rien ne remplace l’exemple d’une foi vivante dans les premières années de la vie, la première expérimentation de la présence de Dieu dans cette petite « Église domestique » qu’est la famille. Nombre de saints ont appris « sur les genoux de leurs parents » l’amour de Dieu et de l’Église : le Curé d’Ars, saint Jean Bosco, sainte Bernadette… Pas besoin de faire de grandes choses, cela passe par de petites actions (certes pas toujours faciles) : lire ensemble une vie de saints, apprendre à se dire pardon, mettre en place un coin prière, aller à la messe le dimanche, prier le soir avec son enfant, si possible en famille, etc. En s’appuyant sur l’aide du Seigneur.
Les parents ne sont pas seuls. Ils sont aidés par le parrain et la marraine de leur enfant (voir la fiche sur ce sujet la semaine prochaine !). Mais également par toute la communauté chrétienne, corps vivant du Christ.